La mort constitue une réalité omniprésente du fait diasporique. Mieux, elle en est un enjeu crucial, en ce qu’elle pose la double question de l’inhumation et de la mémoire qui interrogent le rapport essentiel des diasporas à l’espace et au temps. La mort ne marque pas une sortie brutale de la condition diasporique, mais l’une des modalités d’entrée dans la logique même de cette condition. L’inhumation réactive l’inscription du groupe tout entier dans un territoire déterminé, et constitue le point focal de temporalités à la fois concurrentes et complémentaires – exprimées en termes d’âges, de durées voire de générations. Rendre à la mort la place qui lui revient dans l’histoire des diasporas permet de penser à nouveaux frais à la fois l’humanité même des parcours migratoires, et l’ensemble des constructions contingentes (juridiques, politiques et économiques) qui situent le phénomène diasporique dans ses différents environnements. C’est ce double enjeu que cette enquête collective interroge, à travers un questionnaire transpériode et interdisciplinaire sur la place de la mort dans les diasporas aux époques moderne et contemporaine.
Ce dossier entend faire écho à l’actualité immédiate, marquée par l’omniprésence de la thématique de la mort en migration, notamment à travers le drame des migrants en Méditerranée.
Plus largement, il propose une contribution importante à l’étude des communautés migrantes : le décès des personnes met à l’épreuve les diasporas en les contraignant à se confronter aux univers normatifs comme aux pratiques et aux coutumes des sociétés dans lesquelles elles s’inscrivent.
Ces questions complexes sont abordées dans la longue durée (XVIe-XIXe siècles), en s’attachant à des situations très concrètes, comme l’organisation de la sépulture ou le déplacement des corps.