La notion de réécriture ne cesse aujourd’hui d’être revisitée par la critique littéraire. Elle couvre de multiples modalités d’écriture, de l’imitation à la parodie, en passant par la citation, l’emprunt, le pastiche, l’adaptation, voire le plagiat. Si, pour certains théoriciens, tout texte est le produit d’une réécriture, elle est cependant plus caractéristique de certains processus créateurs. Entre écart, copie et invention, elle permet d’aborder les phénomènes d’appropriation d’un texte par un autre écrivain. Les objectifs peuvent en être divers, comme l’illustrent, par exemple, la transposition dans un autre contexte culturel des Contes de Perrault par Tahar Ben Jelloun, ou la réécriture subversive des Évangiles par Flaubert dans « Hérodias ».
L’écriture de l’histoire par les romanciers est souvent un travail de réécriture – se démarquant, en particulier, du témoignage –, comme le montrent la littérature mémorielle espagnole du tournant des années 2000, le roman français contemporain à propos de la guerre d’Algérie, d’Alexis Jenni à Jérôme Ferrari, ou encore chez Yanick Lahens, l’évocation du tremblement de terre en Haïti. Les mythes sont par nature des objets de constante réécriture, adaptés aux préoccupations d’une époque. En témoignent les résurgences contemporaines d’œuvres matricielles telle que La Célestine, celles des mythes de Faust et de Don Juan, ou encore le jeu malicieux de Marcel Aymé avec les clichés du Jugement dernier pour caricaturer le système judiciaire sous Vichy. La réécriture peut s’entendre aussi dans le passage d’un art à un autre, quand la littérature met au défi la peinture. Enfin, chez Michel Vinaver ou Serge Valletti, la traduction est une forme particulièrement poussée de réécriture, tout comme l’activité critique, telle que l’a pratiquée, par exemple, Jean-Pierre Richard.