Depuis les travaux de Philippe Ariès dans les années 1970, la mort et les morts sont entrés dans le champ des études historiques. Nourrie d’approches diverses, de la philosophie à l’anthropologie sociale en passant par la paléodémographie ou l’archéologie, l’analyse des vestiges funéraires du passé offre un regard original sur les sociétés anciennes et non sans écho avec les questionnements actuels. En effet, autour du cimetière, se construisent des identités religieuses, politiques, sociales, qu’il donne à voir dans ses formes spatiales, dans son organisation monumentale, dans sa conformité (ou non) avec les normes édictées par les autorités ou les communautés qui le gèrent et le contrôlent. C’est ainsi qu’entre la fin de l’Antiquité et les temps modernes se formalise le modèle du cimetière paroissial, situé au sein de l’habitat, autour de l’église, réunissant les morts et les vivants dans une conception de l’ecclesia à la fois communauté, institution et lieu englobant.
Les 35e Journées de Flaran consacrées à ce thème ont centré la focale sur le cimetière rural, quelque peu délaissé jusqu’alors par les historiens. Articulées à plusieurs échelles, de celle globale de l’Europe aux cas régionaux, les communications ont permis de mettre à l’épreuve certains modèles théoriques et, par là même, de les amender et de les nuancer. En considérant la société rurale à la fois dans son ensemble et dans ses composantes particulières, religieuses ou sociales, et en portant une attention particulière à des circonstances spécifiques de mortalité de masse, ces études transdisciplinaires offrent une vision plus riche et plus fondée des sociétés européennes anciennes, sur lesquelles se construit la nôtre.