Le XVIIe siècle peut être envisagé comme le siècle de la raillerie. Rituel de civilité à part entière, véritable lieu commun de la conversation, la raillerie n’est pas seulement discours, mais aussi objet de discours, par un effet spéculaire qui multiplie les réflexions métadiscursives sur cet art de parler. Dans la conversation mondaine, elle symbolise l’esprit de l’esthétique galante par sa manière de conjuguer badinage, effet de surprise et ingéniosité, mais elle devient pique assassine quand elle est dirigée contre une cible. Parce qu’elle possède différents visages, du jeu à la satire, de la critique charitable à la médisance, il convient de distinguer la raillerie douce ou méchante.
Ses usages ne sauraient pour autant être circonscrits aux lieux de la sociabilité mondaine ; par leur efficacité argumentative, par leur portée symbolique, par leur éclat spectaculaire, ils investissent l’espace public des grandes querelles littéraires, politiques et religieuses du siècle. Principalement étudiée jusqu’alors dans sa dimension ludique et galante, la raillerie occupe un plus vaste champ que les articles de ce numéro s’attachent à couvrir.